Bombardement de Bône et Philippeville en 1914

2ème partie

 

La guerre à peine déclarée en mille neuf cent quatorze, Philippeville et Bône furent les premiers objectifs de l'Allemagne.

Les croiseurs Goeben à Philippeville et Breslau à Bône s'attaquèrent à des villes qui n'avaient pas encore préparé leur défense, car la guerre n'était déclarée que depuis quelques heures et personne n'avait imaginé que les premières cibles choisies par les Allemands pourraient être des ports d'Algérie.

Les Allemands à travers ces actions sans grands risques, avaient deux objectifs:

D'abord empêcher les troupes mobilisées dans nos départements de rejoindre la Métropole où les combats les plus meurtriers devraient se dérouler. Et la priver ainsi d'une aide déterminante.

Ensuite, utiliser cette victoire facile à des fins de propagande, tant en Allemagne qu'en Algérie.

Voici le résumé d'un article paru dans le Tag, journal de Berlin, après ces attentats:

" Hier notre contre-amiral décida que les croiseurs Goeben et Breslau devraient détruire Philippeville et Bône. Le quatre aoüt, par un temps brumeux, nous découvrimes les côte d'Afrique. Aucun ennemi, Bizerte paraît dormir. Personne n'est à la recherche des croiseurs allemands, Ponctuellement à quatre heures les deux croiseurs envoient leurs saluts aux côtes africaines.

A Philippeville comme à Bône sont amarrés à quai des vapeurs qui doivent transporter les troupes françaises vers la mère patrie. Le bombardement des deux ports commença en même temps. Philippevile fut entièrement détruite après un bombardement d'une heure. On ne répondit pas à notre feu. Nous nous éloignâment pendant que la ville brûmait en plusieurs endrois.

Le croiseur Breslau bombardait à la même heure quelques navires qui see trouvaient dans le port de Bône : il s'éloigna après avoir tiré quelques coups de canons sur la ville et avoir détruit le fort et quelques maisons."

A Messine, où les deux navires allemands se réfugièrent, un officier du Goeben fit une déclaration au correspondant local de " La Tribuna " qui confirmait le message que voulaient faire passer les allemands.

" Les navires de leur marine avaient détruit entièrement Philippevile et coulé les navires qui se trouvaient dans le port de Bône où ils avaient également fait de nombreux dégats, personne n'avait riposté à leurs attaques. "

Nous étions loin de la vérité, de la réalité. Aussi dès mille neuf cent quinze quand les premiers prisonniers allemands débarquèrent à Philippeville poue être acheminés vers Sétif, il furent tout surpris de constater que la ville n'avait que peu souffert du bombardement surprise de leur flotte.

Mais la propagande allemande ne voulait pas s'arrêter là. Nos ennemis firent graver des médailles, qui sur une face représentait la colonne de la victoire érigée à Berlin après la guerre de mille huit cent soixante dix, avec l'inscription " Dieu protège nos armées ". L'autre face évoquait les bombardements de Philippeville et de Bône.

Ces pièces furent introduites en Algérie par des contrebandiers espagnols afin d'être distribuées aux musulmans, mais elles furent saisies à temps par les autorités de notre pays.

Ces bombardements n'eurent pas les effets escomptés par les Allemands, nos troupes purent rejoindre la métropole sous la protection des marines anglaises et françaises qui contrôlaient la Méditerranée occidentale à cette époque, mais qui n'avaient néanmoins pas su prendre les précautions nécessaires pour éviter les deux bombardements du quatre août mille neuf cent quatorze. Par ailleurs les populations musulmanes, contrairement aux attentes des Allemands, restèrent entièrement solidaires de la France et contribuèrent avec nous à la victoire de la France.

Pour l'anecdote, les deux bateaux en question, après leurs méfaits se rendirent d'abord à Messine, puis le plein de carburant effectué, ils rejoignirent la Turquie qui entra dans la guerre aux côtés de l'Allemagne. A l'armistice le Goeben fut remis à la France à titre de dommages de guerre, puis rendu à la Turquie.

Albert BRASSEUR