ALGER GRONDE.....
La capitale Algérienne, en 1923; après le grand conflit europécn. souhaite jouer un rôle prépondérant dans l'économie du pays en pleine expansion. Les progrès techniques du modernisme en métropole prennent d'autant plus de résonance et d`éclat lorsqu`ils réalisent leurs performances en Afrique du Nord. Voici deux exploits inouïs réalisés cette année là. Une épreuve d'aviation, "le Grand Prix des Avions de Transport", prenant en compte la charge transportée, la consommation et la vitesse fut gagnée par l'équipage français Coupet et Landry sur monoplan Farman équipé de 4 moteurs de 180 chevaux à carburateur Zénith avec 800 kilos de charge utile, battant le record de vitesse commerciale avec 133 km/H Le 26 septembre, le fameux dirigeable Dixmude, type d'aéronef étant considéré comme le meilleur transport de passagers, s'attaqua lui aussi au record du plus grand vol sans escale. Partant de la base de Cuers dans le Var, il traversa la Méditerranée, survola Alger, puis longea la côte en se faisant applaudir à Bougie, Djidjelli et Bône. De la ville de St Augustin, il vire au Sud, survole une partie du Sahara jusqu'à Touggourt d'où il met le cap sur la Tunisie, survole Sousse, Kairouan, Bizerte et prend la direction de Paris, franchit les Alpes après avoir grimpé à 3250 mètres d'altitude pour éviter les turbulences. Le froid gène considérablement l'équipage dont certains seront victimes de saignements de nez ou de malaises heureusement sans gravité. Après s'être exposé à la vue de la Capitale le dirigeable regagne sa base de départ après avoir survolé Trévol en hommage aux victimes du dirigeable "République", Lyon et la vallée du Rhône. Il établit ainsi l'incroyable record de durée de vol de 119 heures et de distance, 7200 km Alger, à cette époque, se distrait au Théâtre Municipal où Mlle Caron dans Carmen est chaque soir applaudie tandis que Mlle Le Dantec. à l'Alhambra triomphe dans " Le Grand Mogol " Les différentes ethnies composant la population Algérienne peuvent sans crainte d'actes racistes, fêter avec éclat leurs traditions. Le 12 Octobre, le Comité Espagnol d'Alger, présidé par Mr Silges, personnalité connue et, qui plus est, consul d'une république Sud-Américaine, organise un grand banquet pour l'anniversaire de la découverte de l'Amérique par Christophe Colomb et la fête nationale " la Raza " Mais la presse algéroise alerte l'opinion publique qui réagit immédiatement, avec la fougue et la vivacité que nous lui connaissons bien. contre un sacrilège qui se tramait en catimini
Le lièvre avait été levé par la Société des Artistes Orientalistes et le Syndicat des Artistes Professionnels dans une missive signée Antoni J Bévia et F Muller adressée au Gouverneur Général Steeg. Il s'agissait; chose à peine croyable, d'une décision de la Chambre de Commerce d'Alger, présidée par Mr Billard, qui voulait profaner et défigurer la vieille darse du port d'Alger jouxtant l'Amirauté pour installer hangars et terre-pleins destinés aux hydravions de l'Aéro Postale. Une estacade de 105 mètres de long sur 70 de large devait être édifiée supportant des hangars de 18 mètres de haut. Sacrilège ! ces constructions masqueraient aux amoureux de la traditionnelle promenade sur les boulevards si prisée des Algérois, l'Amirauté, le Peñon et la jetée Khair Eddine. Les dénonciateurs précisaient même que la maison Schneider était adjudicatrice des travaux qui devaient débuter sous peu Alger gronda et les passions se déchaînèrent. Comment on ne verrait plus le Peñon érigé par Pedro Navarro en l510,. la jetée Kair Eddine, la tour octogonale que l'on équipa d'un phare le l8 novembre 1834, la porte des Lions, le marabout de Sidi Brahim el la voûte où le père Levacher subit son supplice avec stoïcisme. Tout cela serait donc invisible au regard distrait certes mais non blasé du promeneur dominical !
N'était-ce pas assez hideux; cet ascenseur et sa colonne qui défiguraient l'un des plus beau paysage du monde Deux jours plus tard, le docteur Aboulker, Conseiller Général, interpellait le bureau de cette assemblée. Il lui fut rétorqué que la publicité légale avait été faite, mais qui s'obstine à lire les minuscules avis en quatrième page du journal ? Devant l'ampleur des réactions, le préfet Alliez s'engagea personnellement à soutenir la protestation engagée par le Conseil Général pour combattre cette hérésie qui, sans nul doute, aurait défiguré la capitale et coûtée à la collectivité la modique somme de 45 millions or. Le projet capota et je dois remercier nos Artistes Algériens vigilants. sans lesquels, je n'aurais pu lors de mes promenades d'enfant avec mon oncle qui me faisait découvrir sa ville natale et admirer depuis les boulevards le coeur de l'Alger originel Luc Tricou
|